Histoire

Avant de lire l’histoire, il serait bon, si ce n’est déjà fait, de faire un tour ici : https://erudits.forumgaming.fr/viewtopic.forum?p=6500#6500. Juste pour savoir de quoi il en retourne






Bonne lecture, et surtout bonne écriture à tous !!





*

Je me rappelle maintenant cette soirée fraîche. C’est ce soir là qu’on allait les recevoir ces ordres. Des dizaines de jours qu’on l’attendait ce soir là. Ce soir nous allions enfin êtres fixés sur notre sort, libres ou condamnés à être comme ces choses.
Une sentinelle s’approcha de nous rapidement, pour se placer devant le feu à côtés duquel des gars jouaient encore aux cartes a à peine cinq secondes auparavant. Il ferma les yeux et les rouvrit lentement, comme porteurs de mauvaises nouvelles « Ils arrivent ».
Tout le monde compris, la pire chose à laquelle on pouvait s’attendre arrivait. « Ils » arrivent, comme il a si bien su le dire…
« Dites les gars, pourquoi vous faites des têtes de déterrés pareilles ? » demanda Yank, notre cuistot en venant nous annoncer que son infâme potage était prêt « Allez, ne m’en voulez pas, bientôt nous galoperons sur les vertes prairies du nord, on aura plus besoin de manger…. ». Il s’interrompit aussitôt que ce bruit glauque se fit entendre. Un bruit de métal mêlé à ce qu’on pourrait apparenter à des os ripant contre d’autres s’approchait rapidement par le sud…

C’était en effet un détachement entier de l’armée de bathelgore à qui nous étions rattachés désormais. A leur vue tous nos hommes perdirent dans la seconde toute bonne humeur, toute pensée positive ainsi que tout espoir de rentrer chez eux. La guerre n’était pas finie, au contraire.
Le détachement s’arrêta à hauteur de notre camp. Un impressionnant cheval squelette sortit des rangs pour se diriger vers nous. Une créature aussi envoûtante que terrifiante le montait. Elle avait les formes d’une femme en pleine force de l’age, mais les rares morceaux de peau que nous pouvions apercevoir étaient d’une couleur grisâtre et pour certains totalement absents. Son visage caché par un voile de cuir ne laissait paraître que ses yeux, d’un bleu scintillant, à faire baisser les yeux à un mort.
« Vous devez nous suivre, votre mission n’est pas terminée » déclara-t-elle d’une voix aussi sinistre et effrayante que son aspect physique. « Nous avons besoin d’aide pour repousser les parias à la frontière de l’extrême sud, et il n’y a que votre unité de qualifiée pour ce genre de travail » continua-t-elle sur un ton bien plus abyssal qu’avant. Elle donnait l’impression de descendre aux enfers, et de nous entraîner avec elle.
Mais les ordres étaient les ordres et nous étions payés pour les suivre à la lettre.
Une excellente nuit s’annonçait donc avant le départ le lendemain matin…
Je suis donc retourné tranquillement dans ma tente, dans l’espoir de pouvoir repenser –ou pas- à tout ça tranquillement.

*

Le lent froufrou de la toile de tente retombant derière moi m'apporta un instant de paix. Je me sentis comme coupé du monde, protégé, dans un cocon.
Les paroles sinistres entendues ne résonnaient plus dans ma tête, mon coeur ne tambourinait plus comme un petit rat affolé dans sa cage. J'allumai une bougie, m'approchas de la table, défis les liens de la carte. C'est à la fois terrifiant et dérisoire de voir le monde s'étaler sur un parchemin. Les contrées, les montagnes, les routes, notre camp....
L'ennemi tout autour, nous, si petits, si désarmés, si désespérés...

Que faire ?

C'est alors, contemplant la carte établie par nos rôdeurs et permettant d'appréhender dans sa totalité l'ampleur de l'armée dont l'unique obsession est d'annihiler tout ce que nous aimons, qu'Aluna, l'âme de notre armée pénétra dans le clair-obscur de ma tente.
Aluna… Mon âme aspire uniquement à te tenir dans mes bras et tenter de te prodiguer tout l’amour dont je suis capable.
Mais le destin que tu t’aies choisi n’est point celui-là. Ton engagement auprès de Mère Nature et ton sens du devoir te maintiennent à tout jamais hors de portée de mon affection.

Et pourtant te voilà aujourd’hui avec moi dans cette tente, seule flamme apportant de la lumière dans la sombre nuit de ces temps maudits.

L’ennemi approche.

Au delà des stridences de l’avant garde, on entend résonner les tambours de guerre. Au rythme lancinant de cette macabre symphonie, je sens en moi grandir l’angoisse en songeant à tout ce que je risque de perdre si nous faillissions à notre tâche. Mais en même temps, je sens poindre la révolte. Non je ne laisserais pas ces hordes immondes priver le monde de sa lumière, et je sais que mes compagnons d’armes ne le permettront pas plus !

Alors que mon cœur s’emplit de la rage et la haine qui s’apprête à enflammer tout mon être pour m’aider à affronter le combat, Aluna s’approche de moi et étreint mon bras. Dans ses yeux brille une brasier comparable à celui qui m’embrase. Sa détermination n’a rien à envier à la mienne. Tout deux nous sommes prêts à défendre nos convictions et nos valeurs. Nul doute que chacun des braves du camp nous suivra dans notre quête.

C’est empreint de cette certitude et sans un mot que je sors m’adresser à eux et leur expliquer ce que l’état major, nos peuples et le monde tel que nous le connaissons attendent de nous. Il n’est plus possible de reculer. Vaincre ou mourir, tels sont nos dernières options.

Alors que je m’apprête à prendre la parole et que tous les yeux de nos compagnons se tournent vers nous, une aube sanglante se lève dans notre dos.
C’est alors que le silence qui s’était imposé à tous fut brusquement rompu par une sentinelle hurlant « Groupe en approche ! ».

"Pauvres humains ! Comme une bande de petits moutons appeurés tassés autour de leurs tentes.... Regardez les, ils sont pitoyables.
C'est avec leurs petites épées en forme de cure dents qu'il espèrent nous arrêter ?"

Ainsi allaient les pensées qui traversaient l'esprit du Balgarogg, tandis qu'il se glissait a pas de loups vers le camp. Escorté de ses serviteurs, il venait avec une seule et unique intention : anéantir.

Suceur d'âmes, ainsi le surnomme t'on, car il draine l'énergie psychique de ses victimes. Celles ci ne meurrent pas, elle se vident, disparaissent, se subliment dans d'atroces et éternels tourments. Pas d'échappatoire, pas de contre attaque possible. La lente et inexorable aliénation se met em branle sitôt que la victime croise le regard de son bourreau. Elle se retrouve figée, stupéfaite, percée de mille parts, de mille regards, de ces myriades de globes occulaires tels des tentacules qui se croisent, éclosent, éclatent, se reproduisent sur toute la surface du monstrueux corps. Le Balgarogg se déplace ainsi, sur mille yeux qui roulent et éclatent tandis que mille autres apparaissent à l'unisson.

Et aujourd'hui, il a trouvé sa pitance. Ce camp, ces hommes.

"Misérables humains, venez, craignez, espérez, priez... Pour vous le salut n'existe plus..."

Ainsi pensait t'il, s'avancant de sa démarche gluante et cauchemardesque vers le camp.

M'extirpant de mes pensées et du discours que je m'appretais à délivrer à mes compagnons, je me ruais vers le haut des remparts du camp. Aluna sur mes talons, je fus l'un des premiers à découvrir l'horreur sans nom qui marchait vers nous.

Je remerciais les Dieux ancestraux qui nous avez donné le temps d'établir ce camp fortifié à la hate. Ces maigres défenses ne seraient pas de trop face à cette monstruosité rampante et gluante.
Le suceur d'âmes était déjà presque sur nous. Je croyais ces horreurs disparues de la surface de la terre. A l'évidence je me trompais. Je n'étais pas le seul à en être déçu à en juger par les têtes de mes compagnons d'armes, Fito le vif qui tient son nom de la promptitude de sa lame plutot que celle de sa faconde, Arfis l'étrange qui pour découvrir les secrets des arcanes a du sacrifier son oeil gauche et sans doute plus encore, et le très honorable Gortim qui fut mon précepteur avant de s'engager à me suivre dans les batailles.

Avec eux j'avais affronté maintes abominations, mais le suceur d'âme... rien n'est comparable.

Premier à se resaisir, Arfis me tira de ma torpeur:
"Par le feu il faut lutter Kainessa ! Les armes contondantes ne lui feront rien ! Les armes tranchantes lui font mal mais ne pourront causer sa mort. Il faut l'occuper pendant que nos mages et nos sorciers s'installeront d'un coté et les archers de l'autre. Le Balgarogg ne pourra périr que par le feu. J'emmene les arcanistes se mettre en place! Prend garde à ses pouvoirs psychiques, ne reste jamais face a lui et à aucun moment ta volonté ne doit faiblir."
Je m'empressais de répercuter ses instructions afin que chacun sache quel était son role dans le combat à venir.
"Fito, toi et tes coupe-jarrets, vos armes ne serviront pas face au Balgarogg mais je vous charge avec Banku d'occuper les cloportes puants qui l'entourent". Banku avait vécu de nombreux combats sous mes ordres, je savais que maintenir la pression sur l'escorte était dans ses capacités.
Avant même que je lui intime l'ordre de se mettre à l'abri, Gortim m'interpella :
"N'y pense même pas ! Au combat tu vas et ce n'est point dans la pire adversité que tu me verras te faire défaut. Je serais avec toi dans ce combat mes prieres t'accompagneront et la gloire des dieux anciens te protègera de ce monstre."
Tout était dit. Il n'en démordrait pas.
Promptement chacun gagna sa place. Les ordres furent relayés avec efficacité et diligence et bientot le tumulte et le désordre fit place au silence pesant qui précède la bataille.

Je descendis calmement jusqu'à la porte du camp. La bataille devait avoir lieu dehors afin de profiter de nos positions stratégiques.
Pendant que Fito et ses hommes se glissaient subrepticement dans les ombres environnantes, Banku me rejoignit.
Nous etions tout deux engoncés dans nos armures, le bouclier à la main. Ma fidèle épée ne me ferait pas défaut une fois de plus. Lui préférait sa massive hache.
Un sourire aux lèvres il me lacha son traditionnel "Prêt ?".
Et selon notre rituel bien établi je lui répondis en baissant ma visière
"Jusqu'à ma mort !"

C'est alors que la porte de notre fort improvisé s'ouvre et lentement met à jour ce que j'appèlerais plus tard "mon pire cauchemard".

Alors que je reste quelques instants figé face à une telle scène, le suceur d'âme au loin, et ce qui s'apparente à une horde gluante et dégoulinante fonceant droit sur nous dès l'ouverture du fort.

Banku m'interpelle alors et me sors de la torpeur qui m'avait envahi jusque là:
"Hey regardes, l'escorte fonce sur nous et se détache du Balgarogg, c'est peut être notre chance!"

Mais bien sur, il a raison, me voilà dans mon élément, l'organisation d'une attaque dans la panique la plus totale, nous devons en profiter.

"Fitos et Gortim avec nous, il faut éléminer l'escorte tant que nous en avons l'occasion!
Fitos et ton groupe contournes les et prends les à revers en te méfiant du suceurs d'âme, les autres avec moi, nous allons faire face!!
Jusqu'à ma mort!!"

"Arfis fonces ne t'occupes de personne et gagnes le collines avoisinantes elle devraient vous permettre d'avoir une position dominante et répartis ton groupe de manière à gagner du temps pendant qu'ils s'organisent!"

Je remercie le ciel que de telles abominations ne comprennent pas un mot de ce dialecte que nous avont sut développer afin de communniquer durant les combats.
Nous voilà donc face à notre destin, nous, le dernier rempart de la civilisation, pas de quartier, nous voilà lancés.

Le combat fait rage de toute part, l'effet de surprise joue en notre faveur, le Balgarogg ne semble pas pouvoir les rejoindre avant que nous arrivions à bout de son escorte, j'aime la tournure des évènements, tout en m'acharnant à abattre ce qui s'apparente plus à une vulgaire limace qu'un guerrier sans pitié, lorsque soudain Gortim me hurle:
"Attention, tu rentres dans la zone de contrôle mental du suceur d'âme!!!"

Trop tard.... la vile créature m'a vue, un oeil, puis deux, puis trois se tournent vers moi. Je sens son regard pesé sur moi. Je ne peux plus rien faire à part contempler ses milliers d'yeux noirs dépourvu de toute humanité, je me sens comme aspiré par eux, mon esprit ne peut plus lutter, le froid et l'obscurité m'envahissent, je la sens elle est en moi cette immonde bête surgie du néant.

Soudain....

.... Maman, nooooooooooon! Je sanglote elle gît, là, au milieu de son sang, elle a donné sa vie pour me sauver, pourquoi? J'hurle: "Pourquoi elle? Pourquoi as-tu fait ça maman?" Les mercenaires me regardent, et se moque du petit garçon qui pleure sa mère. Ces rires, cette odeur de fer, cette poussière....

....Le combat fait rage, on n'y voit pas à un mètre, soudain, une ombre. Pas le choix c'est elle ou moi. Je tire mon épére et l'enfonce profondèment dans ce corps qui me fait face, le sang coule, "Je l'ai eu". Le brouillard se dissipe. "Oh mon Dieu qu'ai-je fait?" Merten que faisais-tu là? Pourquoi ne t'ai-je pas reconnu mon frère?....

Lutte, pour toi, pour nous. Ne laisse pas cette abomination s'emparer de ton esprit. Pense à nous....

Aluna, c'est toi?

Pas le temps de me poser d’avantages de questions, la bête est à nouveau là, je la sens, son regard est si… froid.

Pas le temps de réfléchir, vider l’esprit, trouver l’épée, combattre.
Le temps ne s’écoula jamais aussi lentement, je ne sais si cela est du à la poussée d’adrénaline qui me poussait, à défaut d’envie de survivre, ou si cela venait de la bête.

Tous les yeux se tournaient vers moi, la mort aurai déjà du me gagner, mais je continue à charger, l’esprit vide, en dehors du temps. Le tumulte du combat ne m’oppressait plus, tout étais calme, aussi calme que sombre. Une lueur me traversa l’esprit, une vision brève, une faille. Je sais comment le tuer. Je suis mon épée et je pénètre dans ce qui peut être assimilé à une bouche, je tourne et frappe, frappe encore, de plus en plus fort, de plus en plus vite…

Mon cœur se mit à ralentir, mon esprit se réveilla. J’étais là, à genoux, sous un soleil aveuglant. Je regardais par-dessus mon épaule, par-dessus la masse gluante et vaporeuse à terre. La bataille avait cessé, les hommes étaient massés autour, marqués par la fatigue et les coups, et ils me regardaient sans rien dire. Nous avions remportés la bataille.

Je ne m’explique toujours pas ou sont passés tous les hommes que nous pouvions apercevoir ni ou étais le suceur d’âme… Mais pour moi, l’heure étais au recueillement, Aluna, ma belle, tu t’es sacrifiée afin de me sauver, je te sais à mes côtés… Et je te vengerais !

Les hommes autour commençaient déjà les comptes et sauvaient ceux qui pouvaient encore l’être, mettant fin aux souffrances des autres. Cette vision contrastait avec ce soleil radieux qui nous entourait.

Une main se posa sur mon épaule. C’était Banku. Sans mots dire, je le suivi. Tout le monde savait qu’il ne fallait en aucun cas rester ici. Nous avions une armée à mener, et aucune faiblesse ne nous serait accordée.